jeudi 28 avril 2016

Ce qu'il advint du sauvage blanc, François Garde, Gallimard, 2012, folio, 381 pages.

   Voici un roman qui relève comme Room (article du jeudi 14  avril) du concours crocqu'en livres, choix de fictions écrites d'après des histoires vécues! Celle -ci est également loin d'être banale.

    Narcisse Pelletier, jeune mousse breton, est abandonné par son équipage sur une île australienne dans des circonstances peu claires. Il y restera 17 ans! Quelle angoisse que cet abandon!

     "Alors, il découvrit qu'il était seul. Il poussa un hurlement, qu'aucun navire ne pouvait entendre. Incapable de penser, fébrile, il fut comme pris de folie: il descendit la falaise à toute vitesse, dérapant, griffé, manquant deux fois se rompre le cou, sauta sur le sable, dévala l'estran, entra dans l'eau jusqu'à la poitrine pour se rapprocher autant qu'il était possible du bateau enfui et hurla de nouveau, cri de rage et appel au secours. Son appel était aussi inaudible depuis la mer que depuis la falaise. Lorsqu'une vague vint lui mouiller le cou, il recula, les yeux fixés sur le large." (pages 13-14)

        L'île n'est pas déserte et il va vivre  au milieu d'une tribu, jusqu'à l'arrivée d'un autre bateau, le John Bell, qui le ramène à Sydney. Il est alors pris en charge par un jeune scientifique français qui va tenter de nouer le contact avec celui qu'on appelle "le sauvage blanc".Il lui faudra déployer des trésors de patience et d'ingéniosité pour établir un dialogue avec cet homme qui a perdu le langage et très curieusement ne semble pas reconnaître sa langue maternelle. "Le cas d'un jeune homme blanc, devenu complètement sauvage, oubliant complètement ses origines, semble sans exemple."(p.272) Le retour à une vie normale parait impossible.

   L'autre protagoniste du roman, le scientifique français,  est Octave de Vallombrun, cet homme qui va passer dix ans de sa vie à tenter de percer le mystère qui entoure "le sauvage blanc" et s'attacher à son protégé qu'il tentera de rendre à sa famille, à son pays, à sa culture.

  Ce roman est touchant et intéressant par toutes les questions qu'il soulève. Montaigne, trois siècles avant Octave de Vallombrun , s'était déjà interrogé à propos des Cannibales  (Essais, I, 31) et avait abouti à cette conclusion:"chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage".

   François Garde a reçu en 2012 pour cet ouvrage le prix Goncourt du premier roman et le prix Jean Giono, distinctions amplement méritées pour l'intérêt de l'intrigue et la qualité du style.



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