jeudi 23 juin 2016

Vous n'aurez pas ma haine, Antoine Leiris, 2016, fayard, 139 pages.

   Antoine Leiris écrit après "Une nuit en barbarie" le récit chronologique à dater du 13 novembre 2016 des événements qui bouleversèrent sa vie et celle de son fils Melvil âgé alors de 18 mois. Il apprend par un coup de téléphone l'horreur du Bataclan. Commence alors l'horreur de l'attente puis l'horreur de la nouvelle: sa jeune femme, Hélène, est morte.

 C'est pour lui le début d' un chemin qui nous bouleverse: Antoine Leiris ne se laisse pas envahir par la haine ou la colère, mais il est tout entier investi dans un quotidien d'amour et de tendresse, attentif à Melvil malgré la douleur qui le submerge:

"Quelques hommes en colère ont fait entendre leur verdict à coups d'armes automatiques. Pour nous, ce sera la perpétuité." (p.23-24)
  Le 16 novembre, "Maison, déjeuner, change, pyjama, sieste, ordinateur. Les mots continuent d'arriver.Ils viennent d'eux-mêmes, pensés, pesés mais sans que j'aie à les convoquer. Ils s'imposent à moi, je n'ai plus qu'à les prendre.
  Je les ai choisis chacun, mariés ensemble, séparés parfois et, après quelques minutes dans la peau d'un entremetteur, la lettre est là: Vous n'aurez pas ma haine."

  Cette lettre qui se trouve aux pages 63 et 64 du livre s'adresse donc aux assassins de sa femme "vous êtes des âmes mortes", [...] Bien sûr je suis dévasté par le chagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je sais qu'elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouverons dans ce paradis des âmes libres auquel vous n'aurez jamais accès.
  [...]toute sa vie ce petit garçon vous fera l'affront d'être heureux et libre. Car non, vous n'aurez pas sa haine non plus."

 Cette lettre postée alors sur Facebook sera lue par des personnes dans le monde entier, toutes bouleversées par ce témoignage pudique et poignant. L'écriture au quotidien a peut-être joué le rôle d'une catharsis.



    On peut rapprocher ce livre de celui d'un médecin palestinien, le docteur Izzeldin Abuelaish ,qui perd trois de ses filles tuées par une roquette israélienne alors qu'à la télévision en direct de chez lui il parle de la situation à Gaza. Loin de se laisser guider par la haine ou la colère, il va mener un combat exemplaire pour la paix.  "Une indispensable leçon contre la haine et la vengeance;" (Elie Wiesel)

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