jeudi 8 février 2018

Et moi, je vis toujours, Jean d'Ormesson, Gallimard, 2018, 280 pages.

    Ce roman posthume de Jean d'Ormesson est éblouissant: vaste panorama de l'humanité -ce JE (le narrateur) la représente- qui nous montre dans un défilé rapide, une course haletante de moments précis de notre histoire, des personnages, hommes ou femmes, qui ont contribué dans un sens ou un autre à notre évolution, et même des anonymes qui constituent son essence  "Je suis l'espèce humaine et son histoire dans le temps" (page  42) "Je suis ceux dont personne ne s'occupe dans leur vie et dont personne ne se souvient après leur mort. Salut et fraternité." (page 268)

  Comment résumer un roman de notre d'Ormesson national? un défi! une gageure! Impossible!

  Je dirai qu'il fait preuve de son érudition, de sa culture que nous savions immense; nous entendons sa voix résonner parfois dans des choix qu'il opère "ces villes d'Italie d'une beauté à tomber, au  charme irrésistible et que j'ai tant aimées." (page 101); ou encore, page 122: "Vivre, pour moi, pour tous les moi où je me suis glissée les uns après les autres, c'était d'abord lire un livre."

  J'ai été particulièrement séduite (et c'est normal pour une prof de lettres!) par les pages sur notre 17ème siècle, sur son théâtre et en particulier sur Molière et Racine. et ce qu'il appelle le "miracle français". La fin du chapitre intitulé L'EUROPE FRANÇAISE nous en donne les clés:

  "Il reposait d'abord sur l'usage et le triomphe d'une langue qui allait devenir la langue de l'Europe et donner à la France, pour un siècle, et peut-être pour un peu plus, le premier rang dans le monde."...

  Mais l'évocation de l'Histoire est aussi l'évocation d'horreurs, comme la guerre, ou plutôt des guerres qui ont ensanglanté notre planète, les maladies qui nous ont endeuillés: "Et il y a de quoi pleurer" (page 228) Quel sens allons-nous pouvoir trouver à notre existence? " Tout passe, tout finit tout disparaît. et moi qui m'imaginais devoir vivre toujours, qu'est ce que je deviens? " (page 276)

  Réflexion sur la vie, sur la mort bien sûr, "Je passe, je dure, je coule avec le temps, j'édifie, je détruis- et de moi, comme de vous, un jour, plus ou moins loin, il ne restera rien." (page 276) et sur l'interrogation finale: et après? Jean d'Ormesson  se questionne sur l'existence de Dieu... sur lequel il estime impossible de parler "Ce dont on ne peut parler[...]il faut le taire"

  Et je pense que vous apprécierez la pirouette finale... Jean d'Ormesson, votre esprit, votre finesse  et votre élégance morale vont nous manquer!
💜 ce livre est d'une lecture relativement rapide; il faut simplement aimer le style d'Ormesson ou se laisser tenter!




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