vendredi 11 mai 2018

Djamilia, Tchinguiz Aïmatov, traduit du kirghiz par A. Dimitrieva et Louis Aragon en 1959, Denoël, 132 pages.

    Découvert grâce à une lectrice (merci à elle!) qui suit mon blog, ce court roman nous narre "la plus belle histoire d'amour du monde". L'expression est employée par Aragon dans la préface.

  Le narrateur, un jeune garçon , découvre ce qui se passe dans l'âme d'un couple, la naissance de l'amour; mais c'est aussi l'amour de la terre, de la nature, de la création toute entière qui est célébré ici.
  Djamilia est la femme de son frère aîné, Sadyk, parti à la guerre quatre mois après le mariage. Dans les lettres adressées à la famille, Sadyk ne met qu'un mot sec pour sa jeune épouse.

  Arrive dans le village perdu au milieu de la steppe un jeune soldat revenant du front, Danïiar, au tempérament associable  et très réservé.

 Notre jeune narrateur et sa belle-sœur se trouvent être associés à Danïiar pour une tâche particulière: conduire les deux voitures à cheval, les "britchkas" chargées de sacs de grains jusqu'à la gare. Leur découverte mutuelle va s'opérer lors d'un retour pendant lequel les deux conducteurs vont chanter et l'enfant qu'est le narrateur réalise -sans pouvoir le nommer- que quelque chose s'est produit: "Ce qui me surprenait le plus, c'était la passion, l'ardeur même dont était saturée la mélodie même." (page 85)
"C'était un homme profondément amoureux. Et amoureux, il l'était, je le sentais bien, pas seulement d'un autre être humain: il s'agissait là de je ne sais quel amour tout autre, d'un énorme amour, de la vie, de la terre." (page 87) Les descriptions qui suivent participent de ce même élan lyrique et nous dévoilent un peu l'âme kirghize.

  La déclaration d'amour ne peut avoir lieu qu'une nuit d'orage: "C'était effrayant et joyeux: l'orage avançait, le dernier orage de l'été." (page 115) Le narrateur qui dort dans la grange va être réveillé par des murmures et assister sans le vouloir à leur déclaration d'amour.

  Je ne peux révéler la fin du roman... mais il est intéressant de voir dans le dernier chapitre la naissance de la vocation de peintre du narrateur "sur le difficile chemin de la quête du bonheur".
  Ce roman puissant allie avec style nature et sentiments. Cette lecture facile et rapide est intéressante et très dépaysante : en effet, à part peut-être Sylvain Tesson et quelques voyageurs sortant des sentiers battus, qui peut prétendre connaitre le Kirghizstan?


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