jeudi 31 mai 2018

Une longue impatience, Gaëlle Josse, Notabilia, 2017, 191 pages.

  Anne est la narratrice de ce court roman très dense en émotions. Elle nous raconte, sous la forme du journal intime, dont le début est daté d'avril 1950, le départ de son fils Louis, 16 ans, qui ne supporte plus les corrections infligées par Etienne, son beau-père.

  Elle a perdu son premier mari, Yvon Le Floch, pendant la seconde Guerre mondiale: son chalutier a été  bombardé et coulé par l'aviation britannique qui avait comme consigne d'affamer les Allemands. Donc, pas de poisson... "Intérêt supérieur des nations, entendions nous." (page 142) On n'avait jamais retrouvé son corps.

  Deux ans après ce drame, Etienne Quémeneur, pharmacien de la bourgade, se déclare: il a toujours été amoureux d'elle, mais a été pris de vitesse par Yvon! Anne accepte de l'épouser et il lui promet d'être un bon père pour Louis.
 Viennent alors deux enfants, Gabriel et Jeanne, et Etienne oublie sa promesse. Il est pourtant plutôt un homme bon, mais il ne sait pas partager son bonheur d'être père avec Louis.

  Jusqu'au départ de Louis... qui ne revient pas. Sa mère le cherche, le guette. Elle sait qu'il s'est embarqué mais il va de cargo en cargo.
 Alors elle lui écrit, des lettres magnifiques, décrivant le festin qui l'attend pour le jour où il reviendra, véritable festin pour accueillir le fils prodigue. Cela évoque aussi Le festin de Babette de Karen Blixen. Elle le guette depuis le bord de mer, elle survit...

  Cette séparation va altérer leur vie de couple: la douleur d'Anne est trop grande. elle se réfugie tous les après-midi dans la petite maison qu'elle a habité avec Louis jusqu'à son remariage, véritable sanctuaire. Elle est très seule dans ce chagrin. Les non-dits ont été trop importants.

 L'épilogue n'est pas inattendu, mais pas complètement tragique. Nous percevons toute une vie tournée vers les autres et plus particulièrement vers ce fils parti, tout cela dans une belle langue à la fois intimiste et pudique.


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