Faut-il présenter Jean d'Ormesson? Je sais qu'il en agace certains, mais j'avoue que l'homme "m'épate" (c'est un verbe un peu désuet mais qu'il affectionne!).
Normalien, élu à l’Académie française en 1973, ami de Jean-Marie Rouart, il fut secrétaire général de l'Unesco, un temps directeur du Figaro, puis il décida de se consacrer entièrement à l'écriture . Quelle culture! et il se plaint de n' avoir rien lu...
Ce livre se présente comme un dialogue entre 2 MOI; le premier MOI (en italiques dans le texte)est le magistrat intègre chargé d'instruire le dossier du second MOI, "C'est moi. Plaisirs, travail, ambitions, foutaises et Cie." (didascalie initiale)
C'est impossible à résumer! il s'agit d'une vie... bien remplie... d'un érudit plein d'humour âgé de 91 ans depuis le 16 JUIN!
Je vous livre quelques réflexions qui m'ont amusée, interpellée, étonnée...
" Vous devez commencer à vous douter des motifs de votre mise en examen: vous n'êtes pas seulement devenu un écrivain, mais une espèce de marque qui, à tort ou à raison, fait rêver les jeunes gens. Quelque chose comme un Schweppes de la culture si vous voulez, ou un Coca-Cola de bas étage, on encore le bas nylon d'hier." (p.176)
Évoquant le tournage d' Au plaisir de Dieu dans la propriété de Saint Fargeau qui n'appartenait plus à sa famille: "[...] l'émotion me submergea. La fiction nous faisait revivre une seconde fois la douleur de la séparation.", et, citant Chateaubriand "Le cœur se brise à la séparation des rêves." (p.208)
Réflexion sur deux métiers qu'il pratique: "Mais ce qui sépare surtout le journaliste de l'écrivain, c'est le mystère du temps. Le temps passe et il dure. Le journaliste est tout entier du côté du temps qui passe. L'écrivain est tout entier du côté du temps qui dure.[...] Le journalisme tient en un mot: urgent. L'écrivain vise l'essentiel." (p.341-342).
Page 379, d'Ormesson cite Aragon qui lui a inspiré le titre:
C'est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m'en irai sans avoir tout dit
[...]
N'ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle
Dans le même registre, page 394, "Je sais bien, [...] que la vie est peut-être triste, qu'elle est en tout cas semée d'échecs et de chagrins et qu'elle est est vouée à la mort. Mais je crois aussi qu'elle est belle et qu'il faut apprendre à l'aimer. J'ai essayé de l'aimer et d'être, dans cette vallée de larmes, aussi heureux que possible."
Hédoniste certes, mais superficiel non!
Et,dans les dernières pages, un peu à la manière de Rousseau dans les Confessions, d'Ormesson s'adresse directement au Seigneur pour lui adresser une ultime prière. "J'ai aimé tout ce qui passe. Mais ce que j'ai aimé surtout, c'est vous qui ne passez pas. [...] Et j’ai toujours espéré que votre éternité de mystère et d'angoisse était aussi et surtout une éternité de pardon et d'amour."
"Je n'ai presque rien fait de ce temps que vous m'avez prêté avant de le reprendre. Mais, avec maladresse et ignorance, je n'ai jamais cessé, du fond de mon abîme, de chercher le chemin, la vérité et la vie."
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